vendredi 18 décembre 2009

Nouveautés: L'île aux étoiles



La revue de la Fondation des Pionniers, après une revue culturelle Australienne annonce dans son numéro de décembre la parution chez l'Harmattan du  roman d'Hélène Savoie, qui est l'auteur de recueils de poésie, de nouvelles, d'essais littéraires, et de publications universitaires sur la littérature de Nouvelle-Calédonie, dont plusieurs sont traduits en Anglais. 
Ce roman a pour cadre la Nouvelle-Calédonie des années 1984, à la veille de l'insurrection qui bouleversa l'île, mobilisa l'attention des pays voisins et de la France,  il se poursuit en Europe (à Prague) et en Australie, jusqu'à nos jours.  Sans être un roman historique, il décrit les petites sociétés insulaires du Pacifique, et nous fait partager  les voyages, les rencontres, les interrogations et les réflexions de son héroïne, fascinée par le continent australien et par l'art  des aborigènes
 

Pour en savoir plus sur cet auteur, voir son site: http// www helenesavoie.com.

Voici quelques extraits du livre.

Premier extrait :


« ...Elle les avait connus à l’époque lointaine où elle était la jeune épouse d’un haut fonctionnaire nommé à Nouméa. Elle  menait alors une vie de rêve dans une villa de fonction bourgeoise, à proximité de plages au sable fin parsemé de petits coquillages dont les opercules blancs lui rappelaient étonnamment les ailes de ces papillons qui volaient dans l'air transparent, près du torrent de Haute Corse où elle avait passé son enfance. Ce signe lui parut de bon augure. Elle découvrit avec délices la grande beauté de cette île française du Pacifique.

Jérémie, son mari, un énarque fraîchement émoulu de l’école d’administration, après avoir fait ses classes au ministère des finances avait accepté avec bonheur ce poste où il comptait donner la pleine mesure de ses capacités à servir l’État. Dans les années quatre-vingt-trois, ce petit Territoire d’Outremer riche en gisements de garniérite, était déjà agité par les revendications politiques et ethniques qui en faisaient l’un des points les plus chauds du Pacifique sud...

L’administration avait attribué au secrétaire général une villa près de la plage de l’Anse-Vata, dans un quartier résidentiel réservé aux happy few des fonctionnaires expatriés, les zoreilles, comme on les appelait là-bas (...) 

…Se tenant à l’écart de ces vieilles rancunes et querelles, le jeune couple avait aimé d’emblée cette  île à la terre rouge dont les collines aux abords de la petite ville, étaient fleuries d’hibiscus, d’éréthrynes et de flamboyants, coiffées du panache vert tendre des aloès, ou s’essayaient à toutes les déclinaisons colorées des bougainvillées (…)

 

*****


« Quelques jours plus tard, il devait effectuer une mission délicate à Koumac, une région minière du Nord de l’île, aride, brûlée de soleil, où d’importants conflits politiques liés aux revendications tribales sur ces terres riches de minerais, menaçaient d’éclater à tout moment.

Comme d’habitude dans ce genre de manifestation, les clans kanaks s’étaient rassemblés sur les routes de mines et dressaient des barrages où les véhicules étaient arrêtés et filtrés. Des hommes en armes y brandissaient de grandes banderoles de calicots blancs, des revendications et des imprécations y étaient inscrits à la peinture rouge. Devant ces visages sombres aux traits figés et hostiles, toute négociation s’avérait difficile ou vouée à l’échec, à moins d’un événement  imprévu. Leur leader, un militant du FLNKS à la carrure de colosse, dont le regard impassible en imposait à ses troupes autant qu’à ses adversaires, le front ceint du « foulard rouge » qui était le signe de ralliement indépendantiste depuis les premiers « sit-in » des années 1968, avait convoqué la presse de toute la région. Les correspondants des grands journaux australiens, néo-zélandais et fidjiens se pressaient autour des manifestants  pour couvrir l’événement et rendre compte de la situation aux autres îles du Pacifique. L’information, reprise par les dépêches des grandes agences de presse, risquait d’être étalée et commentée dans les media internationaux, au grand dam de Matignon. Jérémie savait pertinemment qu’aucune erreur ne pouvait être commise ni en paroles ni en actes, qui pût permettre à ce fin stratège kanak qui savait utiliser toutes les failles de son adversaire, d’exploiter la situation en stigmatisant les « colonisateurs français », et la partie qui devait se jouer s’avérait difficile pour le représentant de l’Etat qu’il était… » 

****

Deuxième extrait :

« En juin 2006, à Paris, deux ans après la rencontre de Geoffrey et de Suzanne, le Président de la République française inaugure le Musée des Arts premiers. Cet événement fait la une des journaux télévisés du monde entier, et TF1 le commente sur la chaîne australienne SBS qui diffuse en version originale des émissions et des films européens. L’Australie est fière qu’un artiste aborigène du Northern Territory ait été choisi pour décorer le hall d’entrée de ce prestigieux institut parisien consacré aux arts primitifs d’Afrique, d’Asie, d’Amérique et d’Océanie. Un reportage lui est consacré où l’on voit ce vieil homme maigre, aux yeux de braise enfoncés sous des arcades sourcilières proéminen-tes, commenter dans un anglais rudimentaire les monumentales fresques  dont il décore les parois du Musée. La journaliste passe ensuite le micro à une spécialiste française des  peintures aborigènes, pour qu’elle explique de façon plus élaborée les techniques de cette œuvre et sa symbolique.

Malgré les dures années qu’elle a passées au coeur du désert australien Sarah a peu changé(...) Selon son habitude, elle est vêtue avec une élégance et simplicité et ne porte en guise de bijoux qu’un pendentif en or serti d’une opale, une pierre exceptionnelle aux reflets d’eau et de feu, que lui ont offert les femmes du clan  qui l’a adoptée. Elle est attentive à ce qui l’entoure, bien que son visage soit aussi impassible que celui de l’aborigène qu’elle accompagne. La journaliste la présente comme une spécialiste des coutumes abos, expliquant qu’elle a vécu plusieurs années avec les peintres, hommes et femmes, du grand Nord australien, partageant leur vie dans le désert: elle a réalisé sur ces nomades l’un des meilleurs documentaires connus à ce jour, régulièrement diffusé sur Canal plus et Arte.(...) Elle explique au micro la symbolique de la fresque unique qu’il élabore minutieusement depuis six mois, préparant ses couleurs acryliques et peignant jour et nuit, suspendu sur de hauts échafaudages, tel un serpent arc-en-ciel sur une branche d’arbre, perdu dans cet autre désert de pierre et de béton qu’est Paris. La journaliste demande au peintre si le Musée des Arts premiers répond aux espoirs des peuples aborigènes, Sarah traduit simultanément la réponse  qu’il donne en langue vernaculaire : ils sont heureux que cet hommage soit rendu à leurs traditions dans une ville aussi importante que Paris, mais figurer dans un musée ethnographique ne suffit pas à leur faire oublier les difficultés quotidiennes que rencontre leur communauté.

« Quelle est votre opinion personnelle sur ce Musée? » demande la journaliste à Sarah, qui explique que le bénéfice de cette promotion des Arts Premiers profite essentiellement aux riches collectionneurs et aux marchands d’art occidentaux, résultat dont les premiers effets sont déjà sensibles : le moindre objet ancien d’Océanie ou de Papouasie atteint un prix vertigineux…»

_______

Ce livre est disponible en librairies à Paris, et bientôt dans celles de Nouméa et du Pacifique, il peut être commandé à l'Harmattan  service des ventes. (son prix: 17 euros)

______



Jean François Vernay nous prie d'annoncer que sa conférence :
"Panorama du roman aborigène (1978-2007)sera donnée le 5 janvier  à la MNC (Paris) à 19h.

Ce professeur d'anglais du lycée de Magenta vient d' obtenir le prix "Lions club" de Thèse Pac pour sa thèse consacrée à un écrivain australien:
 Illusion et réalité dans l’œuvre romanesque de Christopher John Koch, thèse de doctorat.


Pour la petite histoire de Thèse Pac, ce prix fut créée  localement  dans les années 1980 par un universitaire d'Histoire géographie: en partenariat avec la Bibliothèque Bernheim que dirigeait Hélène Colombani, ces thèses (moins nombreuses alors, avant la réforme qui a réduit leur délai de soutenance ) étaient alors confiées à la Bibliothèque du Territoire (qui faisait aussi office de BU pour les étudiants, avant que l'UFP ne dispose de sa bibliothèque).

"L'épopée tragique, le voyage de Surville"du Professeur John Dunmore, best book prize (NZ), est sorti à Paris dans la collection Lettres du Pacifique, il sera disponible très bientôt en librairies à Nouméa, en Nouvelle-Zélande et dans la région Pacifique. Il peut être commandé au service des ventes (Harmattan) y compris en pdf téléchargeable.

 © tous droits réservés.